Combien de temps travaillez-vous pour 67 cents?

Un producteur de cacao en Afrique de l’Ouest, toute une journée.C’est avec ce slogan que Fairtrade Belgium lance sa nouvelle campagne à l’occasion de la semaine du commerceéquitable (3-13 octobre 2018). L’occasion aussi de faire un appel clair : chacun peut agir à son niveau pour aider lesproducteurs à sortir du piège à pauvreté

Coup de projecteurs sur le secteur du cacao

Malgré tous les efforts consentis par l’industrie et les autres acteurs du secteur pour rendre le cacao plus durable, les avancées en termes de productivité ont été plus qu’annulées par les chutes des prix, limitant le revenu des planteurs.

Tandis que produire du cacao coûte de plus en plus, les prix du marché ne cessent de baisser. C’est ainsi que la majorité des producteurs de cacao continuent à vivre dans une extrême pauvreté, un contexte qui favorise le développement des problèmes endémiques : le travail des enfants et la déforestation ne diminuent pas.

2.260.000 enfants ont été recensés sur les plantations de cacao.

La déforestation massive de l’Afrique de l’Ouest : en 25 ans (entre 1990 et 2015), la Côte d’Ivoire a perdu plus de 80% de sa couverture forestière, dont 30% lié à la production de cacao. La même tendance s’applique au Ghana.

L’urgence est particulièrement haute en Côte d’Ivoire et au Ghana, deux pays qui produisent ensemble plus de 60% du cacao disponible sur le marché mondial. Même si leur cacao est convoité, paradoxalement la majorité des familles de producteurs y vivent avec moins de 67 centimes d'euro par jour et par personne.

Allons-nous continuer à accepter que des producteurs continuent à vivre dans l’extrême pauvreté ou allons-nous oser payer le prix qu’il faut pour atteindre des niveaux de vie décents ?

Les producteurs doivent recevoir un meilleur prix pour leur cacao. Tant qu’ils n’atteindront pas un revenu vital, le secteur ne sera pas durable.

Le vice-Premier ministre et ministre de la Coopération au Développement Alexander De Croo a initié une table ronde pour un cacao durable en Belgique en juin dernier. Celle-ci constitue une belle opportunité pour le secteur, à condition que les tabous sur le prix soient brisés. Car dans un secteur durable, les producteurs au bout de la chaîne gagnent un revenu vital. La question est de savoir si nous sommes prêts à en payer le prix?

Le défi est titanesque. « Nos études montrent qu’il faut une approche globale pour aider les producteurs à améliorer leur revenu, il faut les aider à améliorer leur productivité, à maîtriser leurs coûts et parfois à diversifier leur production au-delà du cacao » explique Nicolas Lambert, directeur de Fairtrade Belgium. « Mais elles montrent aussi que vouloir atteindre un revenu décent sans payer de meilleurs prix est tout à fait illusoire. Il faut oser mettre le sujet du prix sur la table et nous regrettons qu’il soit un tabou pour nombre d’acteurs de la filière. Il faut également une mobilisation globale, non seulement des acteurs du commerce équitable mais de toute l’industrie et des gouvernements, tant dans les marchés consommateurs que les pays producteurs »

En Belgique, le consommateur est de plus en plus mobilisé pour le commerce équitable.

Une croissance générale en termes de volume est à noter pour la quasi-totalité des acteurs de l’industrie engagés dans le Fairtrade.2 Pourtant, le challenge reste énorme : aujourd’hui les produits à base de cacao Fairtrade atteint à peine 1% de part de marché en Belgique.

Pour que le commerce équitable puisse apporter une différence significative dans la qualité de vie des producteurs, il faudrait enclencher la vitesse supérieure, et fortement stimuler la demande, notamment en sensibilisant un public plus large. C’est important, car aujourd’hui les producteurs Fairtrade ne vendent qu’une mineure partie de leur production aux conditions Fairtrade. Le reste doit donc être vendu aux conditions conventionnelles, sans garantie du prix minimum et sans prime additionnelle. Une mobilisation bien plus forte des consommateurs, des marques et des distributeurs est donc absolument nécessaire.

On fait tous partie de la solution

Nous pouvons tous agir à notre niveau :

  • Fairtrade s’en engagé à réviser le prix minimum du cacao certifié Fairtrade et à mettre de nouvelles stratégies en place pour créer une avancée significative sur le chemin vers un revenu vital.
  • Les entreprises ont la responsabilité d’élaborer une stratégie garantissant le respect des droits de l'Homme et de l’environnement tout au long de leurs chaînes d'approvisionnement.
  • Les pouvoir publics peuvent inclure et spécifier le commerce équitable comme l’un critères de développement durable dans les appels d’offre publics et faciliter l’accès aux marchés des producteurs certifiés Fairtrade.
  • Les consommateurs peuvent d’une part faire le choix du commerce équitable et d’autre part exiger que les marques aillent au bout de leur engagement en incluant la question du prix dans leurs actions de développement durable.

Un appel commun pour les producteurs de cacao

La face sombre du chocolat est connue depuis des décennies des entreprises et des gouvernements. Malgré cette reconnaissance, le travail des enfants et la déforestation ne diminuent pas. La cause principale de ces problèmes n’est pas traitée : l’extrême pauvreté dans laquelle vivent les producteurs et leurs communautés. Rendre le secteur du cacao durable implique que les producteurs au bout de la chaîne gagnent un revenu vital. La question est donc de savoir si nous sommes prêts à en payer le prix?

Au lancement de la Semaine du Commerce Equitable du 3 au 13 octobre 2018,Oxfam Magasins du Monde, Fairtrade Belgium, World Fair Trade Organisation Europe, Fair Trade Advocacy Office et la Belgian Fair Trade Federation tirent la sonnette d’alarme pour les producteurs de cacao d’Afrique de l’Ouest, et invitent les gouvernements, l’industrie, les distributeurs et les consommateurs à s’engager pour un revenu vital pour les producteurs de cacao.

Fairtrade Belgium est une association liée à l’ONG Fairtrade International, dont la mission première est de mettre en relation les producteurs du Sud, les entreprises, l’industrie, et les consommateurs afin de mettre en œuvre et développer le commerce équitable. Le système Fairtrade est un modèle de commerce plus juste au centre duquel se trouve le label Fairtrade et dont l’objectif final est d’amener les producteurs du Sud à obtenir un revenu vital. Fairtrade sensibilise également les citoyens et acteurs de la société civile belge aux enjeux globaux d’aujourd’hui, et ce, pour atteindre ensemble les objectifs du développement durable des Nations Unies.

Infos & interviews:

Charles Snoeck – Porte-parole charles@fairtradebelgium.be – 0497 78 02 41

Douchka Van Olphen – Resp. Communication douchka@fairtradebelgium.be – 0483 05 70 42