Anne-Marie Yao nous parle du 'Siècle de la femme' de Alexander De Croo

Anne-Marie Yao est responsable du programme cacao en Afrique de l’Ouest pour Fairtrade Africa. Elle porte une attention particulière au rôle de la femme dans la production de cacao. Selon Anne-Marie, le rôle des femmes dans les communautés productrices de cacao n’est pas reconnu, bien qu'elles apportent une contribution importante à la qualité et à la quantité de cacao produit.

Pour soutenir les productrices, Anne-Marie a donc développé la « Women School of Leadership », un programme novateur de Fairtrade pour que les femmes assument davantage d’autonomie. Les femmes et les hommes (!) qui y participent acquièrent des compétences dans les domaines de la finance, de la négociation et de la prise de décision par le biais de plusieurs cours de formation. Ils sont sensibilisés à l'égalité et ont la possibilité d’accroître leur confiance en eux. Les étudiantes diplômées vont à présent pouvoir occuper des postes dirigeants dans des coopératives et dans leur propre communauté.

 

 

En reconnaissance de son travail important pour le développement durable du secteur et le renforcement de la position de la femme productrice, le Ministre de la Coopération, Alexander De Croo, lui a fait parvenir une copie son livre « Le siècle de la femme » accompagné d’un mot de soutien.

Voici la réaction d’Anne-Marie :

Merci pour cette reconnaissance qui m’a procurée grande joie. J’ai dévoré ce livre passionnant en quelques heures !

J’aime beaucoup la simplicité dans l’écriture et les références faites aux cas pratiques et histoires vécues. C’est pour ma part très inspirant et pratique. J’utilise déjà dans mon travail certaines des expressions et histoires faciles à partager, à imager. J’ai par exemple adopté l’expression « poverty is sexist » : j’ai toujours trouvé injuste de sacrifier l’éducation d’une fille au profit de son frère parce qu’il est un « mâle ». C’est tellement injuste et aberrant. Tout comme de limiter l’ascension de la jeune fille parce qu’on a peur qu’elle soit une « vielle fille » plus tard et qu’aucun homme ne voudrait d’une femme trop instruite pour épouse !?

Comme mon père qui a tenté de mettre un frein à mon éducation à mes 17 ans, estimant que mon niveau était convenable pour devenir une femme au foyer. Je réalise aujourd’hui qu’oser tenir tête à mon père, à cette époque (en 1990) était très courageux, même si c’est par une fugue que j’ai réussi à échapper au destin minable qui aurait été le mien.

« La pauvreté est sexiste » est tiré d’un tweet du Premier Ministre canadien Justin Trudeau, que j’ai d’ailleurs décidé de suivre. Ce bout de phrase m’a bouleversé aux larmes. La question de l’éducation des filles est le chapitre le plus inspirant du livre, celui avec lequel je suis parfaitement en phase. Je le suis un peu moins avec la partie « she decides » pour des question de croyances religieuses, bien entendu.

Pour moi, l’éducation des filles est une réponse efficace à la détresse des femmes africaines. L’instruction donne l’ouverture sur la jouissance des droits et la volonté de lutter pour leur respect. Et comme nous savons que ce sont les femmes qui éduquent les enfants et qu’elles influencent aussi beaucoup les décisions des hommes influents, comme  les chefs de communautés, les rois et même les hommes politiques des continents, … Même si cela n’est pas toujours reconnu, la croyance populaire attribue le règne des dirigeants craints et respectés à des femmes impitoyables ou bienveillantes qui partageraient leur vie (soit une épouse ou une mère).

Un proverbe dit chez nous que la nuit porte conseil. En effet, pendant la nuit les sages prennent conseil auprès des mères, sœurs et épouses… Je le pense profondément : éduquer une fille c’est éduquer toute une nation, car la fille porte la nation en elle sans en être consciente.

Il m’a cependant manqué des exemples montrant le rôle d’autres femmes dans cette œuvre de reconnaissance, parce que je pense que « les pionnières » devraient soutenir, encourager et faire le réseautage pour le positionnement d’autres femmes. En un mot, les femmes devraient encore plus se supporter, se porter, s’aimer et se chérir comme l’a récemment partagé Michelle Obama. Il faut des femmes pour porter d’autres femmes. C’est l’arme qu’il faut pour briser le plafond de verre.

C’est certainement « Le siècle de la femme » parce que de plus en plus la femme se rend compte que le monde a besoin qu’elle réalise son potentiel pour mieux se porter.

Cordialement,
Anne-Marie